vendredi 26 novembre 2010

Les Phares

J'ai passé deux heures, cet après-midi, à mélanger des peintures blanche et noire. Et j'ai trouvé je crois ce gris couleur de perle…Il me semble qu'il accueille bien la lumière au bord des pierres et la rehausse légèrement.
Les mots trop brillants abîment tout le travail.



Jean-¨Pierre Abraham. Armen.


Demain nous commencerons à débarrasser de leur rouille la rambarde du bas et les treuils de ravitaillement. Nous repeindrons aussi la porte d'entrée, elle en a besoin.



Mes émotions devraient pouvoir se passer de mots.
Louis Cozan. Un feu sur la mer.



Au large des péninsules

là où se heurtent les grands courants

ils ont dressé des tours de pierres

contre le vent.



Ils ont arrimé sur le rocher

chaque moellon de granite

élevé la tour fragile

de leur souffle et de leur sang

fait tourner la lumière

ouvert des yeux sur la mer.



Puis ils ont inventé des hommes

nés de la pierre et du vent

des hommes aux mots de silence

pour avoir partagé

l'indicible intimité

des nuits entre la roche et l'océan.



Plus tard ils ont fait l'économie

des hommes de sel et de vent

ils ont automatisé les phares

tours inhabitées

accrochées à leur rocher.



C'est fini

plus personne pour lustrer

les cuivres vernis

pour chercher des jours entiers

ce gris de perle

ce gris de lumière

de la jeune fille de Vermeer

et puis repeindre la pierre

le bord de la fenêtre

en pensant à l'hiver.



Abandonnés à la rouille

et à la moisissure

les phares se meurent

dans la lumière éteinte

de leurs cuivres ternis.



Là-haut dans la chambre de veille

plus de regard pour les marins

pour les pêcheurs de l'île de Sein.

Ils ont débarqué les derniers gardiens

ils ont fermé les yeux de la mer.



© Mireille le Liboux

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