"Le Maître – Je rêve à une chose, c'est si ton bienfaiteur eût été cocu parce qu'il était écrit là-haut, ou si cela était écrit là-haut parce que tu ferais cocu ton bienfaiteur ?
Jacques – Tous les deux étaient écrits l'un à côté de l'autre. Tout a été écrit à la fois. C'est comme un grand rouleau qu'on déploie petit à petit. »
Vous concevez, lecteur, jusqu'où je pourrais pousser cette conversation sur un sujet dont on a tant parlé, tant écrit depuis deux mille ans, sans en être d'un pas de plus avancé. Si vous me savez peu de gré de ce que je vous dis, sachez-m'en beaucoup de ce que je ne vous dis pas.
Jacques le Fataliste. Diderot.
A Keragan
matin d'hiver
la marée de la nuit a effacé les traces
sculpté le sable
en ondulations aléatoires.
Autour de l'île
elle suit les stries
marche entre les lignes
de ce yi-king
y cherche en vain
le dessin de son destin
voudrait déchiffrer
les trigrammes
les pictogrammes
laissés par les algues
comme un dictame
à Keragan.
Elle interroge les nuages
voudrait savoir où est son île
demande au cormoran :
il reste indifférent
Un jeune cadavre de crabe
gît sur l'estran
dans son linceul de laminaires :
quel coup de dé a aboli le hasard
cette nuit à Keragan ?..
Mais déjà s'efface
l'écriture ogham
sur la plage blanche
à Keragan.
Elle interroge l'oiseau
le goéland bavard :
connaît-il le chemin solitaire
de l'étranger qui passe peut-être le soir
à Keragan ?…
L'oiseau s'envole et ricane.
Il est midi
un jour d'hiver ordinaire
à Keragan…
Un 24 décembre, Le Fort-Bloqué ou Keragan
publié par Encres vives
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire